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Volo : entrevue sur canapé

    Attention cet article est en lice pour le concours de la retranscription d’interview de Volo qui a mis le plus de temps pour être publiée sur les internets !

    (Mais j’ai une excuse : j’ai subi entre temps une interruption momentanée de mes pieds).

    Vendredi 26 mai 2017, il est 14h. Le soleil et la chaleur inondent le Berry, le délicieux festival L’Air du temps bat son plein. Aux Bains-Douches de Lignières, Frédéric et Olivier Volovitch sont installés sur le canapé de leur loge, la porte est ouverte sur le jardin, leur concert commence dans quelques heures. Tout est nature, calme et volupté… ou presque : Frédo a un gros rhume.

    Vous étiez déjà venus à Lignières ?

    Olive : Oui, on était déjà venus il y a 3 ou 4 ans, pendant la tournée précédente. Et les Wriggles  étaient déjà venus une fois aussi. Mais on croise souvent Annie et Jean-Claude et l’équipe des Bains Douches. Ce sont des gens qui défendent la chanson et qui soutiennent pas mal de projets. On a beaucoup de connexions en commun.  Récemment, ils ont accueilli Nicolas Jules en résidence. C’est quelqu’un qu’on aime beaucoup et dont on apprécie vraiment le boulot. On est aussi très potes avec sa production. Il y a un lien très fort entre nous.

    Comment qualifieriez-vous  le format de cette tournée ?

    Frédo : C’est une formule légère. On est exclusivement accompagnés de nos guitares et de celles de notre camarade Hugo Barbet. C’est acoustique et intimiste. En fait, c’est une formule qui a toujours existé depuis qu’on tourne et qu’on défend des albums et un répertoire. On a eu des formules en groupe mais on s’est toujours laissé la possibilité de revenir sur des formules légères voire minimales : on joue parfois seuls avec le frangin. Nous sommes uniquement tous les deux et  ça nous convient aussi très bien.

    Ça permet également d’aller dans des lieux qui ne sont pas capables d’accueillir des formules en groupe, qui ont de petites économies mais qui veulent Volo quand même. Quand on a crée le spectacle il y a 2 ans autour de ces nouvelles chansons, c’était pour nos 10 ans d’existence ensemble et on est revenus à une espèce d’évidence : Volo c’est des guitares et des voix… Et on a construit le spectacle autour de ce format avec des arrangements presque minimalistes. Les textes et les chansons existent d’abord. Ce sont des chansons à l’état brut.

    Si j’ai bien compris, chacun écrit ses propres chansons. Il n’y a quasiment aucune écriture commune. Comment choisissez-vous ce qui deviendra finalement une chanson de Volo ?

    O : C’est très simple, je joue une chanson à Frédo et si elle le convainc, elle intègre le projet Volo.  Et réciproquement. Le but c’est que la chanson proposée au frangin lui plaise. On a toujours un large choix pour composer un album car on écrit beaucoup, en particulier Frédo.  On a donc beaucoup plus de chansons que ce qu’on va mettre dans un album. Ensuite, on se détermine par rapport à la récurrence des sujets et à ce qu’on veut raconter.

    F : Et puis il y a une esthétique globale. Pour choisir ce qu’il y aura finalement sur l’album, on travaille aussi  avec notre équipe : l’éditeur et le label rentrent en jeu. Ce qui est sûr, c’est qu’on ne sort pas d’album tant qu’on a pas trouvé un équilibre en termes de chansons : Volo n’existerait pas avec 10 chansons d’Olive et 2 chansons de moi ! On aime bien ce mariage des thèmes, des voix et des compos.  Il faut donc qu’on arrive à exister tous les deux à un instant T.

    Est-ce forcément celui qui a écrit la chanson qui chante la voix principale ?

    O : Oui forcément. Mais il y a toujours une exception qui confirme la règle : il est arrivé, mais ça fait longtemps, que je chante une chanson de Frédo. Et puis, même si on écrit la plupart de nos chansons chacun tout seul dans son coin, il y a aussi des chansons qui ont été écrites à 4 mains.

    F : On essaie de chanter les chansons à deux quand le thème le permet mais sinon, le gars qui est en lead sur une chanson, il y a de fortes chances que ce soit lui qui l’ai écrite.

    Vous avez deux chansons qui parlent du Québec, mais l’une a été écrite par Frédo et l’autre par Olive, quel  lien particulier avez-vous avec ce pays ?

    O : Pendant mes études, j’avais rencontré des copains canadiens et j’étais allé en vacances au Québec, autour du nouvel an pour leur rendre visite il y a plus de 10 ans. J’avais rencontré une québécoise, ça s’était pas bien fini et j’avais écrit une chanson ! Mais je n’ai pas de lien particulier avec le Québec.

    F : Mais si quand même, ton lien c’est que ta belle-sœur est québécoise ! Pour la petite histoire, je suis marié à une québécoise de Montréal. On habite en France mais on y va régulièrement, au moins une fois par an pour voir la famille. Donc ça ne donne pas une production hallucinante, mais en 19 ans de mariage, j’ai quand même fait une chanson… et elle parle d’aller mourir au bord d’un lac !

    Quels ont été vos parcours à l’un et à l’autre avant de vous réunir dans Volo ? Olivier, tu es passé de la philosophie à la régie et de la régie à la chanson, comment cela s’est-il passé ?

    O : Je faisais des études de philosophie et je montais à Paris pour préparer et passer les concours de l’éducation nationale. Frédo était déjà à Paris avec les Wriggles et moi j’avais déjà commencé à écrire des chansons. C’est là qu’on a commencé à se faire des soirées de frangins où on se jouait des choses, mais sans réfléchir à ce que cela allait donner par la suite. Lui me jouait des chansons qui n’étaient pas destinées aux Wriggles et moi je lui jouais ce que j’avais. Et puis, je passe plusieurs années le concours de prof de philo, que je ne réussis pas. J’enchaine ensuite des petits boulots alimentaires et j’en suis très heureux, sans vraiment me projeter sur ce que va être ma vie.

    Ensuite, arrive un moment où les Wriggles se mettent à tourner énormément et dans des salles de plus en plus grosses. Du coup, ils ont besoin de quelqu’un qui les accompagne sur la route pour être leur régisseur général et s’occuper des aspects logistiques. Comme ils me trouvent gentil, ils me font confiance et me proposent d’intégrer la tournée. Très vite, parallèlement aux tournées des Wriggles, on commence à faire des bars avec Frédo et là on se dit qu’on pourrait essayer de faire quelque chose tous les deux.

    Cette période s’étale sur à peu près un an et finalement, ça s’enchaine assez vite. La chance que j’ai c’est que je démarre avec Frédo qui est déjà identifié dans le milieu. Donc, dès le premier album,  j’ai un label indépendant, un tourneur et un éditeur. Tout ce que Les Wriggles ont connu comme galères pour se développer, moi je ne l’ai pas eu : je suis passé directement de la case bar à la case d’un projet entouré par tous les partenaires nécessaires pour bien bosser. J’ai eu beaucoup chance ! En tout cas, ça a été très vite.

    Frédo, tu as aussi un parcours particulier puisque tu es passé du théâtre à la chanson avec Les Wriggles et de la chanson des Wriggles à la chanson entre frangins. Comment le cheminement s’est-il construit ?

    F : En fait, le chemin s’est fait naturellement, sans être forcé. Je suis monté à Paris pour rejoindre deux amis tourangeaux (avec qui après on a monté Les Wriggles). Au départ, je les suis pour faire du théâtre puisque j’avais passé un bac A3 Théâtre et que je voulais être comédien. Eux savaient jouer de la guitare et il y avait une guitare dans notre appartement à Paris. J’ai commencé à essayer de jouer et ça s’est plutôt bien passé entre la guitare et moi ! Je ne jouais pas de guitare avant, je venais plutôt de la batterie… Mais une batterie c’était un peu plus dur à emmener sur Paris !

    Après l’école de théâtre,  avec ces deux amis de Tours et deux autres, l’idée de se retrouver tout seul face à des castings et des auditions ne nous faisait pas du tout envie. Comme on avait déjà des chansons, on s’est dit qu’on allait essayer d’en faire un spectacle. Mais en dehors de ça, on a toujours voulu s’aérer et ne pas faire que Les Wriggles. Moi j’avais déjà l’idée de défendre des chansons différemment et le fait de le faire avec Olive est venu très vite parce que j’aimais beaucoup ce qu’il écrivait.

    Si ça se trouve, Olive a fait exprès de rater ses concours de l’éducation nationale ! D’un autre côté, en tant qu’acteur, j’ai monté en 2010 un seul en scène que je joue toujours de temps en temps, à la demande, et qui me permet d’avoir encore un rapport au jeu de comédien. Mais pour l’instant la priorité reste à Volo. On verra ce que cela devient par la suite mais l’envie de jouer la comédie est toujours présente.

    Votre dernier album s’appelle Chanson Française… Quel type de musique écoutez-vous ?

    O : En fait, j’écoute moins de musique qu’avant parce que j’ai des enfants assez petits et que la musique est plus difficile à mettre… Mais en général, j’écoute beaucoup de musique anglo-saxonne, dans des styles que je ne sais pas faire. J’aime beaucoup ce que je fais mais ce que j’écoute, je ne sais pas le faire ! Par exemple, j’aime beaucoup Bon Iver ou Syd Matters. Ce sont des univers que j’apprécie énormément. En chanson française, je suis un peu mauvais en fait. Mais j’aime beaucoup Manu Urbanet, Nicolas Jules et Loïc Lantoine.

    F : Quand on était gamins et ados, on a été baignés dans les grands chanteurs comme Brassens et Brel. Et puis on écoutait aussi beaucoup de variété française comme Cabrel, Goldman, Balavoine, Berger, etc.  J’étais amoureux de France Gall. C’était ce que nos parents écoutaient. Je te raconte pas ce que j’ai acheté comme disque la première fois à 14 ans mais c’est très drôle.

    (Mais si, mais si raconte !) Bon d’accord : c’était le single de Samantha Fox ! Il faut dire qu’elle avait des atouts… Enfin… je veux dire des supers paroles quoi ! Je te dis pas la tête de mon père ! Mais bon, c’était les années Top 50 et j’avais 13-14 ans. Ça a été retiré de mon argent de poche et j’ai assumé. En fait, nos parents écoutaient plein de choses différentes à la maison et ils avaient ce goût pour la variété de qualité. Mais ils nous ont aussi initiés à la world, au jazz, à la musique classique et au rock.

    O : Enfin pas trop au gros rock qui tache non plus hein ! Quand on est arrivés avec Led Zeppelin, notre père a un peu fait oups quand même.

    F : Voilà, sinon, j’ai acheté le dernier Cabrel pour suivre ce que fait ce petit jeune et parce que j’aime bien soutenir les artistes en développement. Je sais que pour lui un disque vendu, c’est toujours ça… Plus sérieusement, je suis plus effectivement sur de la musique internationale. En ce moment, j’ai un ado de 14 ans à qui je fais écouter des choses que moi j’ai découvertes plus tard. J’essaie de compléter ce que sa génération écoute. Je lui amène du Rage Against The Machine, du Beastie Boys, du Nirvana, du vieux rock qui tache ! Des choses un peu énervées, parce que l’année prochaine il aura 15 ans alors normalement il va un peu s’énerver.

    O : On reste quand même très curieux des artistes de la scène française. Par exemple, Ben Mazué moi j’aime beaucoup ce qu’il fait. Je n’achète pas forcément ses disques mais je vais l’écouter sur scène. Il n’y a pas de désintérêt pour la chanson, bien au contraire.

    Pour paraphraser votre chanson : Est-ce qu’on a les élites qu’on mérite ? Votre texte posait beaucoup de questions, il y a eu les élections depuis…

    O : La campagne des présidentielles a été extrêmement triste. Et on s’est encore un fois retrouvés dans un non-choix. Je continue à me poser des questions en tant que citoyen. Je n’ai de leçons à donner à personne mais je me demande ce que je peux faire moi en tant qu’individu dans la cité. En tout cas, il y a de gros enjeux. Et ce qui est sûr c’est que le Président et le gouvernement en place ont un programme qui n’est pas du tout sur le chemin que l’on défend. Concernant les élites, on a quand même découvert ces dernières années que leur niveau de corruption, de passe-droits et de déconnexion était bien avancé !

    Notre éducation a été basée sur le fait d’avoir de la réflexion et de la curiosité sur la manière dont fonctionnent la société et l’économie en général. Nous vivons dans un monde fondé sur l’économie de marché dans lequel la question de la répartition des richesses se pose vraiment. Et depuis une vingtaine d’années, il y a aussi ce qui sera la question centrale pour nos gamins : notre planète et ses ressources finies. Cela pose des questions cruciales. Nous sommes la génération qui a un truc à bouger, sinon ceux qui viendront après pourront nous injurier ! C’est à nous de freiner et d’inventer quelque chose d’autre au lieu de continuer à prendre des voitures et des avions, à regarder le foot à la télé et à manger au Mac Do. Malheureusement, lors des dernières élections, personne n’a fait de l’écologie un axe majeur. On marche vraiment sur la tête.

    Revenons pour terminer à votre concert de tout à l’heure. Par quel titre allez-vous commencer votre concert ?

    O et F : on va commencer par une chanson qui s’appelle Syndrome. Dans ce set, on essaie de faire une chanson de l’un puis une de l’autre. On a fait plusieurs essais, on n’a pas commencé directement avec cette chanson en construisant le spectacle. On commence à avoir beaucoup de chansons et il faut faire des choix. Finalement, celle-là est vraiment adaptée pour dire bonjour et elle est plébiscitée par les gens qui nous suivent et qui nous aiment. Cette chanson nous est souvent demandée. C’est vraiment Volo. C’est doux. Il y a une rencontre, une histoire d’amour et un petit moment de vie. Et en même temps c’est le reflet d’un contexte social où l’on espère que ça va être la grève générale. Du coup, ça fait une bonne présentation !

    Si tu veux savoir à quoi ressemblait le concert qui a suivi cette interview, c’est facile –> c’est ici !

     

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