Il nous en aura fallu du temps pour arriver à te raconter ce qu’il s’est passé pour les 20 ans du Chantier pendant les Francofolies… Peut-être parce qu’en parler, c’est un peu comme dévoiler un secret : celui de spectacles intimes et forts, partagés en petits comités avec des artistes rares dans des lieux atypiques. Et peut-être aussi parce que, égoïstement, on aurait aimé garder pour nous la magie de ces beaux moments.
Mais quand « Devine où je suis… » promet, « Devine où je suis… » raconte !
(*) Tu peux retrouver les épisodes précédents de notre grande saga de l’été en commençant par le début en cliquant ici… Mais tu peux aussi commencer directement par cet épisode, ce qui ne nuira aucunement à ta compréhension.
Cessons donc toute tergiversation et attelons-nous à la tâche :
Pour fêter ses deux décennies francofolles, la joyeuse équipe du Chantier avait concocté trois rendez-vous matinaux avec une programmation des plus alléchantes :
Emily Loizeau (Chantier des Francos saison 2002/2003), Mariscal (2009/2010), François Mary (2010/2011) sans ses Atlas Mountains mais avec le groupe vocal Bostgehio, Pomme (2015/2016), Ben Mazué (2008/2009) et Laurent Lamarca (2010/2011).
Rapidement pris d’assaut, les concerts affichaient complets depuis les premières heures suivant l’ouverture des réservations et les heureux détenteurs du précieux (mais gratuit) sésame savaient qu’ils allaient faire des jaloux !
Chaque jour à 11h, les anciens pensionnaires du Chantier des Francos présentaient une création unique, spécialement pensée pour ce vingtième anniversaire. Et chaque jour à 12h30, on se disait qu’on venait de vivre un moment magnifique, hors normes, et que rien d’autre ne pourrait l’égaler… Chaque lendemain à 10h30, on se présentait devant le lieu du nouveau rendez-vous, encore rempli du souvenir intense de la veille… Et chaque lendemain à 12h30, on rajoutait de l’exceptionnel à l’exceptionnel, de l’émotion à l’émotion, du beau au beau et de l’art à la vie. Une incroyable succession de moments magiques faits de belles complicités artistiques et humaines.
Tu l’auras compris, chez « Devine où je suis… », on n’est pas prêts d’oublier ces rendez-vous d’anniversaire !
Tout a commencé le jeudi 12 juillet 2018 en fin de matinée dans la salle de l’Oratoire avec Emily Loizeau et Mariscal.
Comme son nom l’indique, l’Oratoire a commencé sa carrière au 15ème siècle comme chapelle. Puis il a servi d’hôpital, de magasin d’artillerie et à nouveau d’église. C’est aujourd’hui une salle municipale qui accueille les conseils municipaux et les mariages rochelais depuis l’incendie de l’hôtel de ville en 2013.
Une grande salle très haute de plafond, des murs en pierres blanches et des poutres en bois, une centaine de spectateurs presque intimidés, une ambiance feutrée où chaque son est amplifié, un espace qui fait résonner et virevolter les voix, une minuscule pendule accrochée entre deux immenses drapeaux tricolores, un piano noir, des guitares…
Avant même l’entrée en scène des artistes, le décor nous embarque dans un ailleurs singulier, presque surréaliste.
Pour les raisons cérémoniales et municipales sus-citées (aucun Petit Larousse n’a été maltraité pendant la rédaction de cet article), et par un hasard des plus facétieux, c’est donc sur fond de grandes bannières bleu-blanc-rouge qu’Emily Loizeau et (Grégory) Mariscal entrent en scène. Ils sont accompagnés de deux musiciens des plus talentueux : Csaba Palotai à la guitare et Jeff Hallam (acolyte attitré de Dominique A) à la basse.
Emily est franco-britannique, Grégory a des origines espagnoles, Csaba est hongrois et Jeff américain (presque français aussi puisqu’il avait rendez-vous, dès le lendemain du concert, pour passer l’entretien visant à valider sa demande de naturalisation) ! Ensemble, ils ont choisi de mêler leurs univers et leurs chansons pour parler des exils et des migrations d’hier et d’aujourd’hui, de départs et de fuites, de guerres et de mers traversées… Les chansons que chantent Emily et Grégory et les textes qu’ils disent parlent aussi d’eux, de leurs histoires personnelles et de celles de leurs grands-parents partis d’ailleurs pour venir en France.
C’est musicalement très beau et émotionnellement très fort, c’est souvent drôle aussi.
Un petit aperçu ici :
La complicité entre les 4 protagonistes est parfaite. Une fois le spectacle terminé, on se dit qu’il serait vraiment dommage que d’autres spectateurs n’en profitent pas, tant le propos est riche et tant sa forme est déjà maitrisée. Un moment et un spectacle très précieux. Producteurs, programmateurs, mécènes en tous genres et autres responsables de salles et de festivals, on compte sur vous !
Grégory Mariscal nous raconte la genèse de ce spectacle dans la vidéo ci-dessous :
(sur fond de départ de bateaux s’éloignant vers le large… le hasard n’existe pas !)
Quant à toi, lecteur adoré, si tu veux mieux connaitre Emily Loizeau et Mariscal, internet est ton ami ! Mais tu peux commencer par regarder ça pour la première et ça pour le second.
Le lendemain à 11h, nous avions rendez-vous avec François Atlas & Bostgehio à la Chapelle de l’hôpital St Louis.
C’est dans cette chapelle toujours utilisée comme lieu de culte, accolée à l’hôpital et très peu connue des rochelais eux-mêmes, que se déroulait le rendez-vous insolite du vendredi 13 juillet. François Mary avait pour l’occasion troqué ses compagnons des Montagnes de l’Atlas contre Bostgehio, un beau trio féminin polyphonique basque.
(mea culpa préventif : le champs lexical religieux a été surexploité dans le paragraphe qui suit. Puisse cette faute avouée être, au moins à demi, pardonnée).
Après la République la veille, c’était donc Dieu lui-même (ou peut-être quelqu’un de sa famille) qui nous recevait dans sa maison.
L’accueil fut à la hauteur : entre chants traditionnels polyphoniques, poèmes de Baudelaire mis en musique et morceaux du répertoire de François & The Atlas Mountains en versions acoustiques pour piano, percussions et voix, le moment était absolument divin. Assis sur les bancs habituellement réservés à la prière, spectateurs privilégiés et patients de l’hôpital profitaient ensemble d’une succession incroyable d’instants de grâce. Bénis soient les artistes qui nous ont offert une si belle communion des voix, des textes et des notes. Si comme St Thomas, tu as besoin de le voir pour y croire… et bien, voilà :
À vrai dire, ce n’était pas la première fois que le Chantier des Francos investissait la Chapelle St Louis : il y a 2 ans déjà, Camille Hardouin y tournait ce clip pendant les Francofolies.
Pour découvrir François avec ses Atlas Mountains (dans l’hypothèse où tu ne les connaitrais pas… auquel cas je ne te félicite pas), je te propose par exemple ça… Mais internet regorge de plein d’autres petits trésors à leur sujet.
C’est dans cette même Chapelle St Louis que se déroulait, le 14 juillet à 11h, le dernier rendez-vous d’anniversaire des 20 ans avec Ben Mazué, Laurent Lamarca et Pomme.
Une incroyable file d’attente s’étant créée dans la rue dès le début de la matinée malgré un concert affichant complet à la réservation, c’est finalement le double des personnes attendues qui a pu bénéficier de cette ultime étape festive. Tout le monde n’a malheureusement pas pu rentrer pour des raisons évidentes de sécurité et d’audibilité mais l’équipe du Chantier a tout mis en œuvre pour contenter le plus grand nombre de personnes. Les quelques aventuriers lève-tôt qui avaient tenté leur chance ne l’ont certainement pas regretté !
Précisons que Ben, Laurent et Pomme se connaissent très bien et ont souvent travaillé ensemble : Ben a écrit pour Pomme, Laurent a composé pour Ben, Pomme a chanté avec Ben et Laurent, Ben a écrit pour Laurent. Après une enquête digne du meilleur journalisme d’investigation, nous avons pu rassembler 5 preuves irréfutables de ces belles collaborations :
Preuve 1 – Preuve 2 – Preuve 3 – Preuve 4 – Preuve 5
« Un pour tous, tous pour un » …
… Telle aurait pu être leur devise ! Bien que, contrairement aux 3 mousquetaires, ils ne fussent pas 4 (cette tournure a été imposée à la rédaction par le lobby de réhabilitation du subjonctif imparfait).
Sous les ors et dorures de la chapelle, mêlant leurs répertoires, leurs instruments et leurs voix dans un parti pris intégralement acoustique (et totalement jouissif pour les oreilles), les 3 compères avaient placé ce concert sous le signe de l’union, du partage et du collectif. Ils avaient également choisi de lire ou de dire des textes qu’ils aimaient ou qu’ils avaient écrits pour l’occasion. Le moment fut intense : beau, drôle et émouvant à la fois.
Ben Mazué le concluera parfaitement avec ces mots-là :
Et voici la chanson de circonstance du 14 juillet (le lendemain, jour de finale gagnée, Gloria Gaynor fut également chantée) :
Le spectateur observateur aura remarqué quelques paires d’yeux humides et quelques larmes d’émotions coulant sur les joues de certains.
Il faut dire que le cœur et l’âme étaient mis à douce épreuve… Probablement parce que c’était la dernière de ces magnifiques créations spéciales d’anniversaire et probablement aussi parce que 20 ans c’est le bel âge qu’on rêve tous un peu de retrouver. Sans doute également parce que les habitués, spectateurs, ambassadeurs, contributeurs et artistes du Chantier étaient très nombreux ce matin-là dans cette chapelle-là et qu’ils étaient très émus.
Chacun devait se repasser le film des moments forts vécus grâce au Chantier des Francos : des instants tendres, drôles, déstabilisants ou décisifs, et parfois tout ça à la fois. Des souvenirs plus ou moins anciens : Jean-Louis Foulquier présentant Emily Loizeau, sur la Grande Scène de l’esplanade St Jean d’Acre en 2004 pour une chanson entre deux artistes, Mariscal chantant dans le bus coloré des Francofolies en 2010, François, Amaury et Gerard répétant une phrase chorégraphique pendant leur session de travail du printemps 2011, Christophe Mali renversant un verre de vin rouge sur les chaussures de Pomme Chez Hortense pendant l’hiver 2015/2016, Ben Mazué recadrant subtilement une adolescente quelque peu agitée du premier rang pendant son filage en 2008 et les heures passées à fredonner « Taxi, emmenez-moi » après les concerts de Laurent Lamarca en 2011 (et longtemps après).
Mais voilà c’est fini…
… Enfin pas tout à fait :
D’abord parce que la fête continuera à Saintes à la rentrée avec une soirée d’anniversaire organisée en collaboration avec le fort sympathique Coconut Music Festival. Ce sera le 6 septembre et Voyou, Jaune et Malik Djoudi en seront les maîtres de cérémonie.
Et les larmes sont à nouveau au bord de mes yeux à la lecture de cet article.
Haut les coeurs, il reste le 6 septembre 🙂
Merci et à bientôt donc !
Merci beaucoup d’être passée par là Marion ! Et merci aussi d’avoir laissé un message. Désolée pour les larmes réitérées… Mais bon c’est pour la bonne cause !
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